Texte écrit sur la consigne des impromptus littéraires: Nous vous proposons d'emprunter les rimes du poème «Fenêtres ouvertes» de Victor Hugo sur un thème de votre choix et donc sans vous inspirer du poème, pourvu que vos vers ou vos phrases se terminent par ces mots et dans l'ordre suivant: paupière-Saint-Pierre-ici-aussi-truelle-ruelle-gazon-maison-chauffées-bouffées-Merci-voici-rougegorge-forge-steamer-mer
Il réfléchit si fort, se frotte la paupière,
invoque tous les saints et finit par St Pierre
qui doit bien le savoir, pour quoi il est ici
et pourquoi d’autres pas, qui le méritent aussi.
Il l’a construite sa vie, bâtie à la truelle
joli chateau de sable, au fond d’une ruelle,
des matchs bon enfant joués sur le gazon,
des emprunts, du boulot ramené à la maison…
Des exaspérations lors de soirées chauffées
et des économies par l’alcool bouffées
Et quoi? Faudrait qu’il dise pour tout cela merci?
Vous est-il arrivé de vous faire alpaguer, disputer, réprimander, gronder, et vilipender comme un enfant de 8 ans par une personne âgée
excédée par le monde, la vie, les gens, le bruit des poubelles le matin et surtout … par vous ?
Non ?
Dommage…
Voici une expérience que tout un chacun, pourvu qu’il sache contrôler ses nerfs, le volume de sa voix et l’inaltérabilité de
son sourire se devrait de vivre.
Plus le vieil homme vous rudoie, criant sa hargne à haute et rude voix, mieux vous sombrez dans le souvenir de
l’enfance passée. Et c’est là, ici même, que l’expérience commence. A cet instant où l’envie vous prend de crier cette phrase si souvent répétée par votre enfant de 8 ans :
- « C’est pas juste ! »
Oui, c’est vrai, cette colère est injuste… Ce vieil homme est injuste. Il use comme arme de poing, son grand âge et ce récent handicap dont il souffre et pour lequel vous n’avez pas
pleuré. La colère explosive de cet homme épuisé par les frustrations de la vie est aussi injuste que la
colère explosive d’un parent épuisé par les soucis d’une trop longue journée.
L’enfant de huit ans, lui, trépigne, tape du pied, va dans sa chambre et ravale ses larmes, car face à l’injustice…
il prend conscience qu’il ne peut rien.
L’adulte que vous êtes, et dont je tairai l’âge, garde son calme, sans taper, sans crier… grinçant des dents,
serrant les poings car face à l’injustice… lui le sait depuis qu’il a 8 ans… on ne peut rien.
Ou … Juste peut-être un ou deux bons mots, bien à propos… après tout… on n’est plus des enfants !
Texte écrit sur la consigne des impromptus: "... parfum, consentir, lumignon, croquembouche, impitoyable... En utilisant tous les mots sous la forme qui vous plaira, imaginez en vers ou en prose ce qui vous semble être le message original caché ..."
Le tronc de l’un soutenait la branche de l’autre, affreux pêle-mêle d’une nature déglinguée. L’endroit était sinistre. Sombre carrière bordée d’arbres morts où le lierre enchevêtré formait des nœuds solides et soudés. Sculptures de bois souple aux formes inquiétantes…. la résilience d’une nature laissée pour morte un soir d’octobre après le passage du souffle.
La première impression fût un grand vide de tout. Puis un parfum d’humus léger mais prononcé… avec distinction, s’est mis à virevolté en tous sens près de moi.
Cet amas de bois sec prêt à s’éparpiller, cet affreux croquembouche à demi écroulé consentait à donner un frémissement d’espoir à notre humanité. Un rayon… non, trop vif… une lueur… non, trop encourageant… une flamme, non trop puissant… un lumignon… oui, c’est cela, un petit lumignon marquait de son empreinte timide ce monde impitoyable et douloureux.
Texte écrit selon la consigne des impromptus de la semaine: "...à vous de nous décrire cette semaine des choses nouées..."
J’ai noué mes lacets, dénoué sa cravate, embrassé mon pater et filé au lycée.
J’l’ai laissé seul c’est vrai, en même temps, que faire d’autre. J’suis encore qu’un enfant, un ado, comme les autres.
Mon cœur est oppressé. Il marque des arrêts, un peu comme l’ascenseur dans la cage d’escalier. J’habite au 9eme côté cour. Imaginez …
En bas, c’est le square voltaire. Avant, j’pouvais y jouer des heures entières sans me soucier de rien. Maintenant, c’est différent. Les choses changent. Maman disait ça, bien mieux que moi.
Elle disait : « -C’est bien que les choses changent, ça bouge, on s’ennuie pas… te fais pas de bile pour ça… t’es encore tout jeune, les nœuds au cerveau, ce n’est pas encore pour toi ! »
Elle avait raison. Elle avait toujours raison.
N’empêche que le sac de nœuds, c’est bien elle qui l’a déposé à la porte avant de tout plaquer pour le mec du 3ème (côté rue) !
Avant, c’était elle qui dénouait la cravate de mon père au rentrée de l’usine. C’était elle qui réchauffait le café, allumait la radio et partait travailler après avoir volé aux deux hommes de sa vie un si tendre baiser. C’était elle. C’était elle qui entremêlaient les fils de nos vies et tissait une étoffe qui aurait dû résister à tout.
Maintenant, c’est à cause d'elle que chaque jour la cravate de mon père est un peu plus serrée. C’est elle qui oppresse nos cœurs, et provoquera un jour une panne d’ascenseur.
Le poète Aimé Césaire a écrit : Le crayon de Dieu
lui-même n'est pas sans gomme. Prenant cette phrase comme incipit, proposez-nous un texte en prose ou en vers...)
« Le crayon de Dieu, lui-même n’est pas sans gomme ». Aimé Césaire
Lorsque tombe la neige sur les champs de bataille, les silhouettes des hommes arme au poing, âme errante se profilent sous le drap de l’hiver qui leur ravit les dernières tiédeurs de leurs corps sans
vie.
En couvrant l’agonie d’une couette duveteuse d’un ton blanc virant tout doucement au rosé irisé, l’estompe de la gomme contraint
l’humanité au nécessaire accès à sa lucidité.
Sous la neige : la souillure, les ratures, les horreurs qu’elle a fait.
Sans mémoire de ce qui eut pu être, de ce qui eut dû être, nulle trace de rédemption, de conversion, de regret, de remord. Nul espoir
d’un meilleur, pas de vie… le chaos.
Cependant que la gomme efface, il reste des traces. De celles qu’on n’oublie pas.
Quoique… les erreurs se succèdent, le maillage de nos failles se resserre et l’histoire
ressasse une humanité déglinguée.
L’œuvre qui nous est confiée, se voit diminuée, usée, raturée… si bien qu’à trop gommer, Dieu « entame » le papier.
Pourvu que Dieu nous laisse sur la page sans tâche, le bonheur de poursuivre une vie bien meilleure où le crayon est sans gomme et le
trait plein et assuré…
« Tu tourneras la page plus vite que moi, tu verras… »
Il avait asséné cette affirmation avec une telle conviction qu’il faisait froid dans le dos. J’étais plutôt d’un naturel amer et rancunier envers cette vie qui ne nous avait fait cadeau que de lourdeurs et de vacheries ces 5 dernières années. Ce coup de plus m’avait affectée au moins autant que lui… mais ce ton, ce détachement, cette froideur, c’était effrayant.
L’histoire ne nous avait pas épargnés mais jusqu’alors nous l’avions vécue à deux. Nous avions courbé l’échine, tendu le dos parfois et combattu souvent pour garder la tête haute : chômage, maladie, deuils, espoirs gâchés…et autres injustices que je ne veux ressasser de peur de m’effondrer… Le lot de crasses que vous réserve la vie à tout un chacun mais avec une sensation de cumul en ce qui nous concerne …
Ce jour -là, lorsque la banque nous a convoqué tous les deux comme deux mauvais élèves à un conseil de discipline, pour nous retirer tous nos droits… cette fois-là, nous n’étions plus victime de la vie, nous étions en pleine guerre contre la vie. En sortant, le regard excédé planté dans mes yeux, il m’a dit cette phrase que je n’ai pas aimée : « Tu tourneras la page plus vite que moi tu verras. »
C’était un peu comme si soudainement, il me mettait à un autre niveau que lui, hors champs, hors course. Je comprenais cependant, ou tout au moins je croyais entendre l’indicible douleur qu’il pensait n’exister nulle part ailleurs même pas chez moi, son épouse, celle avec qui il avait tout partagé même ce qu’il n’avait pas.
Et c’est un peu naturellement que j’ai pris de la distance, le temps qu’il ne passe de l’eau sous les ponts.
L’eau a coulé, sale et impure mais elle a coulé. Les glaces ont fondu, et la froideur de mes rancœurs s’est atténuée aussi naturellement qu’il me l’avait prédit. Rien de très chaleureux, non rien, simplement un certain accord qui me permettait de vivre, sans avoir à garder mes distances avec la Vie. Il m’était plus facile sans doute de garder le confort que procure la confiance. La confiance en la vie, la confiance en l’humain, la confiance en l’avenir…
Je n’ai rien oublié, non, faut pas croire, mais bon… faut vivre tout de même…
Lui aussi, à mes côtés, il a vu l’eau couler, les glaces fondre, les mains tendues et les quelques éclaircies pales dans notre quotidien…
Alors le jour où les pompiers sont intervenus au bas de l’immeuble, j’étais plutôt sonnée. Suicide, ils disaient… ou pas loin de ça…
Moi je n’ai pas su trop quoi dire. L’enquête a tourné court… La police en relatant les faits me parlait de circonstances atténuantes…. d’un mari fatigué… de ne pas trop m’en faire… que j’n’aurai rien pu faire… A bien les écouter, ils paraissaient presque étonnés que je n’sois pas étendue là à ses côtés !
Je m’suis approchée de la fenêtre d’où il était… tombé. Elle était ouverte calée par un livre, bloquée sur la dernière page. J’ai retiré le livre, fermé la fenêtre, puis tourné la page, celle où était noté le mot FIN et la date d’édition du bouquin.
Il avait noté là, tout en bas au crayon noir, cette sorte de dédicace qui m’a fait froid dans le dos :
« Tu tourneras la page plus vite que moi tu verras… »
Tu m’étonnes… il n’était pas prêt de la tourner cette page-là !!!
Hors-piste, Hors-jeu, il m’avait sorti de sa vie avant de sortir de la mienne…
(pour les impromptus - écrire un scénario de court métrage pour la musique de W. Bolcom)
La journée avait été difficile, beaucoup trop pour un type comme moi qui n'avait rien à attendre d'autre dans la vie que l'ingratitude de son chat et le fumet de plat mijoté de la voisine du
premier.
J'accroche mon pardessus, quitte mes vêtements de travail et attrape une bière dans le frigo avant de jeter un
dernier coup d'œil à la rue.
Il pleut. Le jour se couche tôt et les fenêtres d'en face sont toutes allumées… sorte de kaléidoscope feutré
d'une fin de journée: TV, enfants survoltés, parents fatigués, ado affalés, ambiance de diner…
Et puis, en guise de fumet, la musique du 1er, une sorte de ragtime où piano et violon entrent en
conversation…
Dans l'appartement d'en face, Joan danse d'une chambre à l'autre pour coucher mes enfants. Les chatouilles,
l'histoire, les câlins…la lumière qui s'éteint....
C'est la salle à manger, qu'elle allume en premier.
Elle file vers la cuisine prend une bière (pas changée…), virevolte de lieu en lieu, s'enfonce dans le canapé, décroche le téléphone et parle à ses parents à grand renfort de gestes, comme s'ils
étaient présents.
Repose le téléphone. Le petit s'est levé, elle va le recoucher mi attendrie, mi énervée…et laisse cette fois-
ci le couloir allumé.
Et puis plus rien. Ni musique, ni fumet….
Vue son large sourire, sans doute, un bruit de clé…. Il est rentré.
Je ferme les stores. J'allume la télé. Je caresse mon chat, seul, dans mon meublé.
En installant son avenir là....à l'endroit même où il avait laissé ce passé noir, sali, entaché, jugé et
soi-disant « payé ». Il s'apprêtait à vivre, exposé au jugement de ceux qui savaient... ce qu'il avait été.
En installant son avenir là, comme on installerait son transat dans un endroit doux et abrité, il
s'apprêtait à creuser un peu plus profond le sillon d'une douleur qui de lui irradiait.
Comment ces gens pourraient-ils puiser la force de chercher à voir ce qu'il était devenu, au regard de ce
qu'il fût ?
En installant son devenir à deux pas de ceux qu'il avait brisés, cherchait-il à se racheter une conduite, une
identité ? Celle-là même que jamais plus, on ne lui donnerait...
Ici bas, il ne pourrait survivre que de son avenir, mais surtout pas de son passé...
Et encore...
Comment ces gens pourraient-il lui laisser un devenir...là ...où lui-même avait fracassé
le-leur ?
En commettant le pire, il avait condamné. Et quoiqu'il en ferait, sa vie ne saurait racheter celle qu'il avait
volée.
Il était évident qu'il ne serait vivant que là où personne ne saurait de sa vie : le passé, les erreurs, les
méfaits...
N'empêche....
En installant son avenir là... à quelques mètres de nous, qui ne craignons pas ce qu'il est. Il s'apprête à vivre
comme si de rien n'était... exposant ses voisins à côtoyer le pire : un homme, un meurtrier qui bien qu'ayant « payé » pourrait bien s'endetter.... à nouveau...
Comment pourrions-nous laisser en toute confiance près de lui ...nos enfants ?
"A la fin de sa peine, un meurtrier, un assassin... peut venir se réinstaller à quelques mètres de ses
victimes...RIEN n'oblige actuellement les magistrats à vous prévenir"
Il s'est arrêté devant le monument aux morts sur la petite place que tout le monde connaît.
Il n'y avait pas de fleurs, de drapeaux, de cérémonies... juste lui... et les voitures qui attendaient au stop leur tour pour passer.
Il a égrainé du bout des lèvres tous les noms inscrits sur la pierre, comme on égraine les perles d'un chapelet. Puis la pluie s'est mise à tomber, juste quelques gouttes...Cela a suffit...Il est parti ...poursuivre sa vie en ayant pris appui sur ce que d'autres, en laissant derrière eux, ont laissé derrière lui.
Il s'est arrêté sur la petite place, devant le monument aux morts que bien peu ont connu. Il n'y avait plus ni fleurs ni couronne, pas de 14 juillet ou de 11 novembre en vue...
Il est passé là, sans doute par hasard... ou guidé peut être par un devoir de mémoire.
Le devoir de mémoire...
Planter dans la terre, graver dans la pierre, tout cela ne suffit plus. Qui donc s'arrêtera quand cet homme ne sera plus ?
Qui donc pensera à ralentir son pas devant ce monument aussi moche, qu' « inutile »? Qui sera curieux de lire les noms ici gravés ?... Deux trois ados, en mal de lecture...attendant leurs copains assis sur la marche, une canette à la main ??... Peut-être, quelques écoles n'ayant pas les moyens de faire une sortie de classe trop loin....
Planter dans la terre, graver dans la pierre, tout cela ne suffit plus. Le devoir de mémoire ne doit pas être révolu.
Assise à ma terrasse, j'écris sans conviction. Je cherche l'ordinaire de ma situation et je ne vois rien...rien que de
l'extraordinaire... dans la banalité avec laquelle je vis, et dont je suis comblée.
Etrange illusion que celle de croire que la banalité est une chose ennuyeuse. C'est un luxe, un confort auquel n'accède pas tout le
monde aussi normal qu'il soit.
Je sais que l'équilibre est ainsi fait, qu'il est précaire et si fragile.... qu'il vaudrait mieux ne pas bouger, ne pas se poser de
questions inutiles et laisser la brise souffler sur son toit et les vents dévaster les maisons alentours....
Egoïste lâcheté ....A chacun de juger....
N'empêche... enquêtes et reportages, journaux, télévisions nous laissent percevoir certains mondes surfaits de bonheurs
«tapageurs et sur-joués » : des vacances sur les yachts, des idylles sur une île, des maisons sur la côte, des vies tellement « faciles »...
Toutes ces émissions.... C'est notre « vent du nord » à nous....les gens à la vie si « banale »... Un vent qui
nous permet de ne pas nous sentir « trop privilégiés », de feindre la « normalité », et donc ainsi de continuer à vivre en toute sérénité...
Je tape sur mon clavier, la wifi m'le permet...Je cherche l'ordinaire de ma situation...et je ne vois rien ...rien qu'un Bonheur aux
multiples questions.